Dans les coulisses du MMA avec Benoit Saint Denis

Benoit Saint Denis Combat MMA

Très populaire aux Etats-Unis, le MMA est encore une jeune discipline en France. Elle est autorisée depuis 2020 sous l’égide de la fédération française de boxe anglaise. Elle compte environ 70 000 adhérents et cinq athlètes font partis de la plus prestigieuse des organisations mondiales d’arts martiaux mixtes l’UFC (Ultimate Fighting Championship). La fin d’année 2021 a été marquée par les premiers pas de Benoit Saint Denis alias « God of War » au sein de l’UFC et ce début d’année 2022 par le combat entre le camerounais Francis Ngannou et le français Cyril Gane pour la ceinture des poids lourds. Pour mieux comprendre cette discipline et le quotidien des « guerriers » du MMA, nous avons rencontré Benoit Saint Denis.

Avant de revenir sur votre parcours, sur le MMA, avez-vous regardé le combat entre Francis Ngannou et Ciryl Gane ? Qu’en avez-vous pensé ?

“Bien sûr. J’ai assisté à un beau combat poids lourd. Tous les styles de combat ont été utilisés : pieds, poings, sol et lutte. Les deux premiers rounds étaient serrés et indécis. Francis Ngannou a ensuite accéléré au niveau de la lutte. Il a acquis beaucoup de technique dans cette discipline ces derniers mois. Cyril est jeune dans le MMA, il doit encore progresser en lutte. En France, nous avons une très bonne école « pieds et poings » mais nous devons progresser sur les techniques de lutte et au sol. Les américains sont très avancés dans ce domaine. Ils pratiquent la lutte à l’université et dominent d’ailleurs avec les russes les Jeux Olympiques dans cette discipline. Ngannou s’entraîne aux Etats-Unis avec cette culture américaine de la lutte en cage. Il a donc énormément progressé et profité de cet avantage pour faire la différence dans ce combat.”

Le MMA est encore une jeune discipline en France, pourriez-vous vous présenter au Grand Public ?

“Je suis Benoit Saint Denis alias « God of Ware ». Je pratique le MMA depuis trois ans au niveau professionnel et j’ai découvert les sports de combat, il y a 5 ans. Avant, je faisais partie des forces spéciales françaises en tant qu’opérateur SAS (Special Air Service). A cette époque, je n’avais pas forcément comme objectif d’intégrer le MMA. J’ai commencé les sports de combat par le Ju-Jitsu, une discipline axée sur le sol puis j’ai eu envie de découvrir « le pieds poings ». A l’image des décathloniens en athlétisme, j’étais attiré par toutes les disciplines. Le MMA a donc été une évidence. Il offre plus de liberté et permet d’exploiter toutes les techniques de combat. J’ai fait mes preuves au sein du « Medium Training Form », une formation parrainée par mon Head Coach Woirin. J’ai remporté mes huit premiers combats avant la limite. L’UFC, la meilleure organisation mondiale d’arts martiaux mixtes m’a alors repéré et proposé d’intégrer leur structure. Une fierté puisque la France ne compte que cinq combattants UFC.”

Pourriez-vous nous décrypter le MMA ?

Le MMA fonctionne comme le décathlon en athlétisme. Il y a un coach par spécialité et un coach pour la stratégie globale. Pour réussir, il faut être complet. Le MMA regroupe les techniques de lutte au sol, les pieds et les poings. Les combats « classiques » se composent de trois rounds de cinq minutes avec une minute de récupération entre chaque round. Les combats pour les ceintures sont eux composés de cinq rounds. Le système de notation est identique à celui de la boxe : dix points pour le gagnant du round et entre neuf et sept pour le perdant en cas knock-down, de tentative de soumission ou de domination. Un score de dix à sept est tout de même très rare. Le MMA comporte également de points dits de  « bienséance », les athlètes peuvent être pénalisés en cas de doigt dans les yeux ou de coup dans la coquille.

Vous êtes soucieux de faire progresser votre sport et les athlètes de niveaux inférieurs. Aujourd’hui, comment un jeune peut-il s’inscrire au MMA ? Trouve-t-on des salles et des éducateurs partout en France ?

Le MMA se popularise en France. A Paris, il y a de nombreuses salles de MMA. Aujourd’hui, toutes les grandes villes ont une équipe professionnelle. Les jeunes ont alors accès à des salles avec des athlètes au niveau assez élevé. Aujourd’hui en France, le MMA est rattaché à la fédération française de boxe anglaise pour tous les combats professionnels. Si l’UFC vient en France, je combattrais certainement sous l’égide de cette fédération. Pour l’instant, l’UFC n’est pas encore en France. Je pense que si Cyril avait eu la ceinture, un combat aurait eu lieu en France pour la défense du titre. Maintenant, ce n’est pas fermé, il va falloir plusieurs combats pour qu’il prenne sa revanche et pourquoi pas un combat en France dans les prochaines années.

Quel est votre quotidien en tant que boxeur professionnel de MMA ? Etes-vous entouré d’un Staff ? D’une équipe médicale ?

Un combattant de MMA a une charge d’entraînement assez importante. Après, il faut être intelligent et savoir varier les séances d’entraînement. Voici ma semaine type :

  • Préparation physique : 2 fois par semaine
  • Entraînement MMA : 2 fois par semaine
  • Entraînement spécifique lutte, sol et pieds poings : 1 fois par semaine
  • Kinésithérapie : 1 fois par semaine
  • Etirements : 2 fois par semaine

Je suis également accompagné par une équipe médicale. Elle me permet d’avoir des examens médicaux rapides et d’être sur pied le plus rapidement possible en cas de blessures. Je m’entraine aussi à l’étranger. Par exemple, j’ai profité de ma lune de miel au Brésil pour m’entrainer. N’oublions pas que le MMA est d’origine brésilienne. Cette année, j’ai prévu de partir aux Etats-Unis. Je considère que ces stages font partis de mon travail. Ils me permettent d’approfondir ma technique et de progresser. J’essaie de prendre le meilleur dans chaque pays.

Racontez-nous ce premier combat à l’Ethiad Arena d’Abu Dhabi contre le brésilien Dos Santos. Si j’ai bien compris ce combat n’était pas prévu dans votre programme de l’année ? Pourquoi l’avoir accepté alors que Dos Santos évolue dans une catégorie de poids supérieur à la vôtre ?

 

Ce premier combat m’a permis de réaliser mon premier objectif : rentrer à l’UFC. Ils ne m’ont pas rendu la tâche facile. J’ai combattu directement contre un adversaire classé à la douzième place dans sa catégorie de poids, ce qui est très rare, sauf si tu es champion dans une organisation comme « Bellator » (deuxième plus grande organisation d’arts martiaux mixtes aux Etats-Unis derrière l’UFC). Dos Santos était en plus dans la catégorie de poids au-dessus de la mienne. J’ai eu la chance de le rencontrer car beaucoup d’athlètes ont refusé de l’affronter. Je devais saisir cette opportunité.  Je me suis donc préparé pendant trois semaines pour ce combat. Le match a été difficile dans tous les sens du terme. Nous nous sommes faits la guerre dans la cage. La différence s’est faite dans le deuxième round. Il m’a échappé des mains pendant deux minutes et il m’a touché plusieurs fois. Il gagne ce round dix à huit, ce qui lui permet de remporter le combat. C’est dommage car les rounds 1 et 3 étaient très équilibrés. A ce niveau la différence de poids a un impact important, les appels au sol demandent plus d’énergie et les coups sont plus lourds à encaisser. Il y a des catégories de poids ce n’est pas pour rien.

On vous décrit comme quelqu’un de gentil, humble, calme et respectueux. Comment passe-t-on de cet homme « tendre » à « God of war » dans la cage ?

 

Quand tu es combattant de MMA, tu dois avoir ce caractère. J’ai la chance de me dépenser à la salle, je n’ai pas besoin de  m’exprimer ailleurs violemment. Le MMA est avant tout une passion. Je pense que tous les sportifs de haut niveau sont assez calmes dans la vie en dehors de leur sport.

Aujourd’hui, un athlète de MMA vit-il de son sport ?

 

Depuis que je suis à l’UFC, je bénéficie de primes de combat. Je peux donc payer mes séances d’entrainement et mes charges. Je dois continuer à rechercher des sponsors pour préparer au mieux mes combats, avoir un coach supplémentaire et pouvoir faire venir ma femme sur mes combats. Les réseaux sociaux m’apportent de la visibilité. Je dois continuer dans ce sens. L’UFC ne paie pas tout. Tu dois payer ton billet d’avion, ton manager et ta salle. Ce qui rapporte le plus ce sont les combats. Quand tu rentres dans une structure comme l’UFC, tu as deux, trois ou quatre combats maximum par an. Tu dois donc gérer ton argent. On le voit d’ailleurs dans le palmarès des combattants de MMA : il est souvent beaucoup moins étoffé qu’un boxeur de boxe anglaise ou de boxe Thaï qui combat deux cents fois par an. Quand tu as la ceinture tu fais uniquement un à deux combats par an.

Quel est votre programme en 2022 ? Refaire des combats mais en – 70kg ?

 

Oui, si j’avais pu rentrer directement en moins de 70 kilos à l’UFC je l’aurais fait, malheureusement il est très difficile pour des français de rentrer à l’UFC. Il faut alors savoir saisir sa chance. L’UFC préfère signer avec un américain, 70% des combats ont lieu aux Etats Unis et le MMA est le troisième sport national derrière la NBA et la NHL. Les intérêts financiers sont donc différents. Cette année, ils ont accepté que je combatte en moins de 70 kilos. Le changement de catégorie de poids va me permettre d’exprimer d’avantage ma technique. Je devrais combattre à partir de mi-avril, le nom de mon adversaire et le lieu de mon prochain combat seront connus mi-février.

Le MMA sollicite au maximum votre corps et vos articulations. Avez-vous un secret pour préserver vos articulations et éviter les blessures ? 

Aujourd’hui, j’utilise le Gel Tenofort du Laboratoire français Labrha. Il est naturel, non dopant et efficace. Il pénètre rapidement dans la peau, il ne graisse pas et il soulage mes différentes douleurs aux articulations. Il est essentiel pour moi d’avoir ce type de produit, en plus « Made in France » car en tant que sportif de haut niveau, je « tire sur la machine ». Je veux mettre toutes les chances de mon côté et ne rien louper. Mon corps doit absorber les charges de travail et les combats avec le moins de blessures possibles. Après, j’ai la chance d’avoir un sport qui me permet de varier mes exercices et donc d’éviter des blessures importantes. En comparaison, en boxe anglaise, tu utilises toute la semaine les épaules, tu es donc plus à risque de blessures. En MMA, les athlètes utilisent au quotidien la chaîne abdominale, les cervicales et les hanches,  je pends donc soin de ces parties du corps.

Merci Benoit de nous avoir accordé cette interview et à très vite pour tes prochains combats.